Après la nuit
L'affrontement entre le shérif Jude Stanton et un inconnu à la recherche de reconnaissance.
1872 - 1899 : de la IIIe république à la fin du XIXe siècle [USA] - Middle West
Weswood City, Kansas, le shérif Jude Stanton gère la ville d’un gant de fer. Mais, un étranger arrive à Westwood, prêt à le défier. Stanton fait le rapprochement avec un ancien ennemi Jedediah Cooper…
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Date de parution | Avril 2008 |
Statut histoire | One shot 1 tome paru |
Les avis
On est assez loin du western spaghetti de type Durango ; ici, la simplicité du scénario est compensée par un western tout en atmosphère qui met en scène les illusions perdues. C'est un western lent, contemplatif, à forte dose de psychologie, au ton crépusculaire affirmé, qui rappelle certains films des années 70 comme John McCabe, Josey Wales hors la loi, Dialogue de feu, Butch Cassidy et le Kid, ou Juge et Hors la loi... à l'heure où Hollywood revisitait le genre qui avait fait sa gloire. C'est un western mélancolique qui reprend certains ingrédients habituels et un vernis d'imagerie d'Epinal, mais derrière lesquels une vision trop réaliste a fait disparaître le côté magique ; un réalisme sordide qui marque la fin des héros, car ceux-ci ont vieilli, leurs jours sont comptés, ce sont les dinosaures d'un Ouest en décrépitude, la nostalgie n'est plus ce qu'elle était. Le jeune pistolero connaîtra une fin dérisoire, à l'image même d'un genre qui a abandonné tout romantisme au profit du cynisme. La scène de sexe torride justifie par son audace l'éclatement d'un univers qui fut jadis clinquant et folklorique. Rugueux et hostile, cru et impitoyable, le Far West offre désormais le spectacle d'un paysage morne et vide, à l'instar de la superbe couverture d'album, et des cases de début et de fin sur le patelin de Bartlesville. La construction des premières pages, sans dialogue est magistrale, le dessin est fabuleux, Guérineau a effectué un travail remarquable sur les visages, les ombres, certains éléments de décor, les cadrages ; les couleurs achèvent de rendre ce récit véritablement hypnotique, qui incite une fois qu'il est lu, à s'attarder sur la beauté des dessins. J'ai vraiment l'impression en lisant ce récit de retrouver l'équivalent en BD de ce que j'ai vu dans certains films, tout est parfaitement restitué. Une pure merveille.
Imaginez… quelques notes de « l’homme à l’harmonica » titillent vos oreilles, les vrillent bientôt. Le vent, le sable, la chaleur s’insinuent dans votre esprit. La musique enfle, gonfle ses notes et vous emmène là où les auteurs souhaitent vous rencontrer : dans « il était une (autre) fois dans l’ Ouest ». Le scénario ?… une ville de ce vieil Ouest sauvage, un shérif aux méthodes radicales qui en ont fait une sorte de légende, un rien de sexe, de la violence et –surtout- un inconnu qui y débarque en traînant deux cadavres. Seulement voilà : l’homme dit s’appeler Jedediah Cooper, comme le nom inscrit sur la tombe du dernier homme qui avait osé défier le shérif… alors : « résurrection » ?.. ou ?… Je m’attendais à quelque chose d’explosif. En réalité, il s’agit plutôt –et c’est ce qui en fait sa force- d’un western intimiste où l’image « parle » souvent plus qu’un texte. Cette ville d’ailleurs est une sorte de personnage à part entière. Elle respire et vit, tirant sa substance de ce que devait être l’Ouest de la fin des années 1800. Ce western tire aussi sa force visuelle par une colorisation aux tons « crépusculaires » qui préfigure elle aussi cette sorte de « fin du temps des cow-boys ». Au dessin ?… Guérineau (Le chant des Stryges) montre ici –et de quelle façon- une autre facette de son talent. Jouant des archétypes du genre, il distille la tension, joue sur les regards des intervenants, effectue des cadrages serrés… un peu comme ces « spaghetti westerns » qui me sont chers. A sa façon, Guérineau fait « sentir » ses pages, balance des silences qui sont d’autant efficaces. Un grand western ?.. sûrement. Un « autre » western ?… aussi. Un scénario ciselé, efficace, diabolique dans sa construction se marie avec un dessin somptueux par moments. Histoire, dessin, couleurs : une excellente alchimie des trois genres pour un tome vraiment captivant.
Depuis le temps que je suis le travail de Richard Guérineau (une douzaine d'années en gros), je sentais bien qu'il pourrait faire quelque chose de bien dans le western. Son talent pour poser des ambiances, son trait réaliste mais très reconnaissable en font un artiste "typique" du genre. Et cet album est un projet qu'il portait en lui depuis déjà plusieurs années. Mais il a pris le temps pour le réaliser, le peaufinant, avançant dans sa concrétisation entre deux tomes du Chant des Stryges. C'est son complice d'atelier, Henri Meunier, qui l'aider à achever le scénario. Oh bien sûr, on ne va pas crier au génie pour un scénario au final assez classique, mais plutôt à l'efficacité. Cette histoire se tient très bien, et l'album forme un tout cohérent. Mais pour moi, c'est vraiment le traitement visuel qui en fait un véritable classique. Guérineau montre une fois de plus son talent de metteur en scène, son art des cadrages, la maîtrise de son trait. C'est Raphaël Hédon, désormais en charge de certains albums de l'univers des Stryges, qui se charge de la mise en couleurs, et visiblement Guérineau et lui sont sur la même longueur d'ondes, puisque le choix des palettes me semble tout à fait judicieux. Je l'ai déjà dit, c'est un classique.
Guérineau a eu une superbe idée, celle de se lancer dans le Western. Il nous montre là une nouvelle facette de son talent, loin de l'univers des Stryges auquel nous l'associons le plus souvent. Dans cette version "noir et blanc", son dessin explose, à tel point que je n'envisage même pas l'achat de la version courante (je demande pardon par avance au coloriste) de peur d'être déçu. Et comment passer à côté d'une telle bande dessinée, qui loin de revisiter les canons du genre, au contraire, en épouse les grands thèmes : L'incipit, muette, m'a fait songer aux grands Westerns portés à l'écran, tels Il était une fois dans l'Ouest ; le shérif est le clone de Wild Bill Hickock ; le saloon transformé en bordel est plus vrai que nature ; et enfin même les auteurs n'ont pas oublié le duel final. Bref dans le genre "comment faire du neuf avec du vieux", les auteurs ont pleinement réussi ce pari. Un des albums incontournables de cette année.
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