Silence
Angoulême 1981 : Alfred du meilleur album ex æquo Muet et simple d'esprit, Silence habite et travaille chez un fermier dominateur dans un petit village des Ardennes. Ignorant les rapports de force omniprésents dans la société, son destin sera tragiquement bouleversé par sa rencontre avec Sara. Ami des bêtes et naturellement bon, il apprendra à découvrir l'amour et la haine.
Angoulême : récapitulatif des séries primées Best of 1980-1989 Casterman Comès Handicap Les années (A SUIVRE) Noir et blanc One-shots, le best-of Petits villages perdus Sorcières Wallonie
En 1941, Silence est né des amours de Violante Renard, fille célibataire d'un fermier belge des Ardennes, et de Gorgio, un tzigane marié, dans le petit village de Beausonge. Contrainte de se marier à Abel Mauvy, qui avait tué sournoisement Georgio, Violante meurt immédiatement après l'accouchement. Muet et simple d'esprit, Silence est ridiculisé et frappé par les enfants de son âge. Il est aussi régulièrement battu, méprisé, humilié et exploité par son beau-père. Dans les années 1970, alors qu'il est dans la trentaine, soit au moment où se déroule le récit, Silence est à nouveau ridiculisé et exploité par les gens du village. Il est l'ami des bêtes et naturellement bon. Un jour il entrouvre la porte d'une grange dont l'accès est interdit. Il y rencontre Sara, une sorcière. Grâce à la magie, celle-ci va lui faire connaître l'histoire de ses parents. Il rencontrera de nouveau Sara chez elle, et elle lui fera découvrir la sorcellerie, la haine et l'amour. Humilié par Sara qui repousse ses avances, Abel Mauvy la saigne à mort, puis la viole. Il fait porter son crime crapuleux sur Silence qui est rapidement arrêté. En captivité, Silence se lie d'amitié avec son camarade de cellule. Ensemble, ils réussissent à s'évader et se réfugient au sein d'un cirque ambulant. Silence retourne à la maison de la sorcière, il apprend comment Abel Mauvy a tué Sara. Sur les entrefaites, le meurtrier fait irruption... Abel Mauvy le tue et le décapite... En fin de récit, la mort de Silence est sublimée. Face à mer, l'objet de son plus grand désir, Silence est rejoint par Sara. Survolés par des goélands, main dans la main, ils s'immergent tout doucement. Bientôt, seuls les traces de leurs pas dans le sable restent visibles… Collection de récompenses : o Grand-Prix Saint-Michel, 1980. o Yellow Kid du meilleur dessinateur étranger à Lucca. o Grand-Prix de la BD 1981, le journal de la presse et du livre / RTL
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Date de parution | Octobre 1980 |
Statut histoire | One shot (Edition en 2 tomes couleurs dispo.) 1 tome paru |
Les avis
J’ai fini par lire cette bd que je voyais depuis longtemps, notamment dans les immanquables, mais qui ne m’attirait pas plus que ça. Finalement, Casterman m’a quasi forcé la main en proposant une réédition à bas prix de certains de ses classiques à l’occasion du festival d’Angoulême. J’ai donc pu enfin lire cette bande dessinée, et c’est vrai que c’est bien. L’histoire est sympa, l’immersion du fantastique pas trop dérangeante pour la fluidité et la cohérence. J’avoue que j’ai souvent un peu peur du « c’est pas grave, c’est magique » où le fantastique explique un peu tout et n’importe quoi, mais plus je lis de récit fantastiques plus j’apprécie. Ici, il vient en support d’une histoire d’exclusion, de défiance et de jeux de pouvoirs dans un patelin rural où les rôles sociaux sont bien définis. Comès vient nous raconter la stupidité et la méchanceté banale et quotidienne des petites gens, qui finit par blesser, humilier et tuer. Le personnage de Silence est un témoin actif de tout cela et des luttes qu’il ne comprend pas mais auxquelles il participe. Ce personnage est assez réussi, il devient assez sympathique aux yeux du lecteur et on se prend d’amitié et de compassion pour lui. Les autres personnages sont réussis, j’ai personnellement bien aimé ceux de la sorcière et du sorcier, et celui du nain qui se lie d’amitié avec Silence. L’histoire ne m’a pas lâchée du début à la fin et j’avoue que j’ai été captivé jusqu’au bout. Le dessin est un plus du récit selon moi, il est vraiment beau. J’ai bien aimé les traits des personnages et surtout leurs expressions faciales que je trouve très fortes. Chaque personnage a une expression bien à lui, et cela renforce la puissance du récit. Une bien bonne bd qui va me pousser à lire d’autres œuvres de Comès.
J'ai vraiment beaucoup aimé ce récit de Comès que je classe perso comme une de mes lectures préférées. "Silence est un être qu’on n’oublie pas” écrivait le poète Henri Gougaud dans sa préface de l'oeuvre de Comès. Modestement j'ajouterais que le personnage d'Abel Mauvy restera pour moi l'une des personnifications du Mal les plus abouties du monde de la BD. À la croisée du conte mystique et ésotérique, du récit philosophique ou symbolique j'ai découvert une grande richesse dans ce scénario si singulier. J'ai immédiatement été séduit par la personne de Silence. Sa force animale, son rapport confiant à la nature et aux autres ainsi que son parler simpliste de type "pidgin" me l'a immédiatement et symboliquement placé dans l'état de l'homme naturel intrinsèquement bon (question philosophique ?) asservi en esclavage par le massif et vénal Mauvy. Comès a-t-il voulu y faire une critique du colonialisme européen ? Perso cela a été ma grille de lecture dès les premières pages. Mais les antagonismes sont nombreux tout au long du récit : richesse du coeur vs vénalité, spiritualité et "folie" vs rationalisme destructeur, courage de la sorcière vs lâcheté du village. Ce dernier antagonisme renvoie lui, à un Mauvy colabo et profiteur, image renforcée par les uniformes noirs des gendarmes, presque tirés de la garde-robe des Waffen-SS. On pourrait se dire que Comès tombe dans un manichéisme facile opposant le Bien et le Mal d'une façon simpliste et partiale. Mais Comès introduit beaucoup d'intelligence dans son scénario. Il y va par petites marches qui représentent bien nos renoncements. Ainsi Mauvy est d'autant plus préoccupant qu'il est l'image de l'inhumanité qui a grandi au fond de nous-même depuis des siècles. La fin résonne comme à un retour à une autre logique puisque le justice des hommes n'est pas pour "Silence". J'ai beaucoup aimé le final lucide sur les rapports de force mais optimiste dans sa pensée onirique. Quel plaisir de découvrir le trait de Comès qui porte le récit de façon très efficace. Tous les visages sont aussi tourmentés que l'ambiance pesante de Beausonge. Les détails sont rares mais les éclairages et les contrastes suffisent à créer cet univers de secrets et de monde clos. De plus j'ai apprécié de retrouver un graphisme qui sort de l'uniformité lassante de trop de dessinateurs. Une lecture qui m'a fait vibrer comme une sonate au clair de lune. Excellent.
"Silence" est une véritable pépite de la bande dessinée. Cette oeuvre magistrale m'a captivé et émerveillé avec son mélange unique de chronique paysanne, d'onirisme et de fantastique. L'histoire nous transporte dans le village fictif de Beausonge, immergé dans l'atmosphère envoûtante de l'Ardenne. Au coeur de cette aventure se trouve Silence, un jeune homme muet au cœur pur, qui devient l'homme à tout faire de l'odieux Abel Mauvy. Mais à travers sa rencontre avec une sorcière aveugle, Silence découvre ses origines et les raisons de se venger de son maître tyrannique. Ce qui rend "Silence" si exceptionnel, c'est le talent artistique de Comès. Son trait graphique en noir et blanc est d'une beauté saisissante, utilisant habilement les contrastes et les jeux d'ombre pour créer une ambiance sombre et mystérieuse. Chaque page est une véritable œuvre d'art, avec des détails minutieux et des expressions émotionnelles qui transpercent l'âme des personnages. Les personnages de "Silence" sont profondément complexes et nuancés. Silence lui-même est un protagoniste attachant et vulnérable, dont la force réside dans sa pureté et son innocence face à la cruauté du monde. Abel Mauvy, en tant qu'antagoniste, incarne la brutalité et la méchanceté, créant un contraste saisissant avec Silence. Les autres personnages, tels que la sorcière aveugle Sara et le mystérieux Blanche-neige, ajoutent des dimensions fascinantes à l'histoire, apportant des éléments de destinée, de vengeance et de quête d'identité. Au-delà de l'histoire captivante, "Silence" explore des thèmes profonds tels que l'intégration sociale, la superstition et les relations familiales. Comès nous invite à réfléchir sur la nature humaine, la dualité entre le bien et le mal, et les chemins tortueux de la destinée. Tout en étant ancrée dans la réalité paysanne, l'histoire bascule dans le fantastique, offrant une dimension onirique qui transcende les limites de la bande dessinée.
Silence est un homme, un peu limité (style Forrest Gump) qui a été "asservi" par l'homme le plus influent du village, qui est aussi une véritable ordure. On suit l'histoire à travers les pensées de Silence, qui, j'ai oublié de le dire, est muet. A mes yeux, l'immense point fort de cette album est de nous faire suivre l'histoire par les yeux d'un benêt, innocent et sincèrement gentil. Hormis Forrest Gump, c'est la première fois qu'un benêt arrive à m'intéresser et même à m'émouvoir. J'ai trop souvent eu l'habitude de lire des caricatures concernant les idiots et ici, on en est loin. Deuxième point positif : l'originalité de l'histoire. Quand on a lu des centaines, voire des milliers d'histoires différentes, il devient de plus en plus difficile de trouver une histoire qui arrive encore à nous surprendre. Et bien ici, chacun des chapitres m'a étonné. Jamais, je n'ai réussi à deviner où l'auteur voulait m'emmener. Quel plaisir de lire une histoire vraiment originale. Enfin, j'ai beaucoup apprécié le dessin en noir et blanc. Les traits des personnages reflètent vraiment bien leurs émotions et leur personnalité. Rapidement, on s'identifie ou on déteste les protagonistes tellement les planches sont expressives. Un bon 4 étoiles MAUPERTUIS, OSE ET RIT !
En résumé : 5/5. Pour ce que j'ai lu de Comès (La Belette et Eva) : à défaut de se réinventer par la suite, l'auteur a réussi à inventer quelque chose dès le départ avec Silence. Je juge une BD culte si elle arrive à me faire voyager alors que je suis vautré dans mon canapé. Silence y parvient à merveille. Maintenant que j'ai dis ça, que dire...à part que je suis émerveillé partout : le dessin, le noir et blanc, l'atmosphère intemporelle, le mystère des origines, la campagne qui peut se situer aussi bien dans les Ardennes qu'ailleurs, l'intrigue, la profondeur des personnages, notre empathie pure envers Silence, notre dégoût pour une partie d'Humanité qui veut asseoir sa domination d'une manière égoïste, injuste et cruelle. Pour une de ses premières créations, Comès a donc réussi à aborder tous les thèmes et les pensées qui lui sont chers d'une manière aussi bien singulière qu'intelligible. Intelligible oui, mais pas simple. On peut trouver une profonde réflexion derrière cette histoire. C'est un grand classique dont je vous impose la lecture pour y faire votre propre avis (car ça peut ne pas plaire aussi!).
Cette œuvre est magnifique et envoûtante. Tout d’abord l’ambiance est prenante on s’attache à Silence qui est à l’opposé des protagonistes habituels d’une bande dessinée. En effet il est muet et pas malin, l'idée originale pour nous faire comprendre ça est de faire des fautes d'orthographes quand on lit les pensées de Silence. Il se fait manipuler par les autres personnages qui abusent de sa gentillesse. Malgré tout il dégage un charisme et une forte présence. On plonge totalement dans la vie de Beausonge, village de campagne à l’atmosphère poétique et inquiétante à la fois. On ne décroche pas jusqu’ à la dernière page. On suit Silence dans sa vie quotidienne qui va finir par lui révéler son mystérieux passé ce qui aura pour conséquence de changer sa vie. Le dessin en noir et blanc est superbe et tous les personnages ont des «tronches». Abel Mauvy est angoissant avec son regard sadique. La sorcière est mystérieuse et sensuelle à la fois. Blanche-Neige est un nain à l'air malicieux. C’est quand même drôle d’avoir appelé un nain Blanche-neige. Pour conclure je conseille vraiment cette bande dessinée qui n’a rien a voir avec les bandes dessinées classiques.
Malgré les indications permettant de situer l’intrigue dans l’après Seconde guerre mondiale, c’est une histoire quasi intemporelle que nous présente ici Comès. Cela aurait pu se passer au Moyen-âge, et d’ailleurs cette absence d’ancrage clair dans le temps est constitutive du charme exercé par cette histoire. Et Comès a un indéniable talent de conteur. On entre dans les secrets, les tabous qui lient cette petite communauté villageoise très facilement. Et on suit l’ouverture au monde et à lui-même de Silence, dans une ambiance saturée de haine, de non dit et de bêtise. En plus d’être un bon conteur, Comès a aussi des talents de dessinateur, et son trait, en Noir et Blanc, joue aussi un rôle non négligeable pour faire de cet album une grande réussite. Cela faisait quelque temps que je voulais lire Silence, que je n’ai déniché que récemment. Et cela a été un grand plaisir. Les nombreux prix reçus par cet album sont bien mérités.
Je trouve que cette Bd a été trop surestimée, et ce dès sa parution en 1979, récoltant tous les trophées de la profession et classant immédiatement Comès parmi les grands auteurs de la BD, ce qui a contribué un peu à occulter toutes ses oeuvres ultérieures qu'aucune n'est parvenue à égaler. Bon, il faut avouer que "Silence" mérite sans doute cet honneur, c'est un récit fort et poétique, qui prône la différence, qui a marqué les esprits car il est sans aucun doute le plus personnel de son auteur. Il faut dire que ce long mélodrame romantique est superbe, Comès y explore les frontières de l'inconscient et brosse le portrait tout en nuances d'une communauté coupable qui se terminera par une tragédie où s'invitent mysticisme, fantastique, sorcellerie et régionalisme campagnard, le tout à travers le personnage d'exclu social que représente Silence, ce pauvre sourd-muet exploité par la méchanceté d' un tyran rural. Et c'est bien là ce qui m'a rebuté un peu lors de ma découverte de cette bande dans A Suivre, son côté tragique, car la fin est d'une tristesse démoralisante. En la relisant longtemps après, j'ai surmonté ce sentiment et mieux accepté cette fin ; comme quoi, il faut relire certaines Bd à différents âges de sa vie, on les appréhende souvent sous un autre aspect. Graphiquement, ça m'a tout de suite plu, le récit est mis en valeur par un beau noir et blanc qui confère un surplus d'étrangeté, et contribue à l'atmosphère trouble voulue par Comès, dont le trait lorgne un peu vers celui d'Hugo Pratt, et dont le seul défaut est dans la représentation un peu ratée des visages. Je comprends que cet album soit culte pour certains lecteurs, même si ça me paraît excessif, pour moi, c'est un beau drame villageois qui vous prend certes dès les premières pages, et où la narration est aussi belle que le dessin, c'est tout. Quoi qu'il en soit, aujourd'hui, même après tant d'années, c'est devenu un grand classique de la BD qu'on peut avoir dans sa Bdthèque, de préférence le gros pavé Casterman d'origine, qu'on trouve facilement en occase.
Silence ... Que dire de plus sur cette oeuvre culte de la bd franco-belge période à suivre ? Rien. Tout a été dit. J'ai été bercé par cette oeuvre magistrale depuis tout petit et sa relecture est toujours un plaisir où l'on se laisse porter par l'ambiance envoûtante de sorcellerie campagnarde. Les jeunes lecteurs pourraient être rebutés par le graphisme très particulier de Comes, ses visages étranges statiques et froids (tel un mélange de serpents et de chats) assez datés c'est vrai, mais ça serait passer à côté de la superbe magie triste qui imprègne cette oeuvre. Certaines pages sont sublimes (en particulier celles avec le sorcier " la mouche" et celles du crapaud).
En relisant cette BD, je me suis rendu compte que je l'avais mal notée. Car Silence possède trop de qualités pour un simple 4/5. Non, elle est franchement culte. J'en suis sûr. Comes parvient à réunir à merveille son dessin en noir et blanc aux gueules si campées avec un récit mêlant les vieilles croyances, les petits villages, les sorcières et les idiots, les animaux et la nature. Le récit est rempli de douceur et de poésie, bien que la bêtise, la méchanceté et la noirceur des êtres humains transparaissent. Une haine envers les étrangers traverse les albums : aussi bien envers ces gitans qu'envers ce pauvre Silence simple, ou encore envers ce petit nain difforme qui se retrouve à l'asile on ne sait trop pourquoi. Et face à cette haine, les armes des simples d'esprit : le silence obstiné d'un homme peu malin. L'émerveillement devant la mer, devant des choses simples, des petites envies de gâteau ou simplement des mots tracés maladroitement sur une ardoise. Silence, c'est une BD simple et efficace, on n'est pas dans une énigme policière, pas dans un grand roman, pas dans une fresque. C'est simple, à l'image de ce petit village en apparence calme. Mais derrière beaucoup de choses couvent. Et au final, Silence ouvrira les yeux sur ce monde. Il cèdera un temps à la violence, avant de retrouver son monde simple. Mais il est déjà trop tard. La haine a gangréné tout. Nul gagnant au final. Mais est-ce vraiment la fin ? J'ai maintenant Silence depuis un long moment, et je constate qu'il reste un plaisir à le lire et relire, dans un soir tranquille, quand on est installé confortablement dans un fauteuil, une bonne tasse de thé à portée de main. Et voila qu'on rouvre à nouveau le livre, et l'atmosphère déjà présente rejaillit brutalement, vous enveloppe et vous refait plonger le temps d'un récit dans une campagne française. Un récit qui à force de relecture atteint pour moi le statut de culte. Je le mets dans ma réserve personnelle, toujours à portée de ma main et prêt pour une nouvelle relecture.
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