Mattéo
Récit romanesque de haute tenue, composé de quatre époques, Mattéo raconte la destinée singulière d'un homme qui, de 1914 à 1939, de la guerre de 14 à la Seconde Guerre mondiale, en passant par la révolution russe, le Front Populaire et la guerre d'Espagne, traversera époques tumultueuses et passions exacerbées.
1914 - 1918 : La Première Guerre Mondiale 1930 - 1938 : De la Grande Dépression aux prémisces de la Seconde Guerre Mondiale Anarchiste ! Nouveau Futuropolis Occitanie Première Guerre mondiale
Près de Collioure, tout appartient aux de Brignac : « les vignes, les maisons, les gens, enfin leur travail ». Mattéo et son ami Paulin « en savaient quelque chose, ils y bossaient, et dur encore ! Le pressoir n’était pas que dans les chaix ». Quant à Juliette, l’amour de Mattéo, recueillie par les de Brignac à l’âge de trois ans, elle est considérée par « eux » comme un membre de la famille. Mattéo, qui « n’avait pas envie d’être charitable » pensait qu’elle « faisait juste partie des meubles ». En août 1914, quand éclate la guerre, cette « saleté de chien d’aveugle qui nous tirait dans la merde et bouffait nos gosses », le destin de Mattéo bascule. Fils d’un anarchiste espagnol, disparu à jamais en mer, Mattéo, parce qu’il est étranger, échappe à la mobilisation générale. Première contradiction : alors que son ami Paulin et les garçons de son âge partent à la guerre en braillant, le jeune homme, élevé par sa mère au biberon du pacifisme, ressent confusément la honte de rester à l’arrière, avec les femmes et les vieux. Paradoxe encore, plus insupportable celui-ci, Mattéo côtoie quotidiennement Juliette, quand celle-ci tremble pour Guillaume de Brignac, engagé dans l’aviation. Absurdité toujours : quand, taraudé par le remords de n’être pas au front aux côtés de son ami, et meurtri par la belle indifférence de sa Juliette, Mattéo se décide enfin à rejoindre les tranchées.
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Date de parution | 09 Octobre 2008 |
Statut histoire | Série terminée 6 tomes parus |
Les avis
Jean-Pierre Gibrat nous peint une fresque qui nous transporte dans le tourbillon révolutionnaire post Grande Guerre. Servi par un scénario d'excellence et soutenu par un dessin de maître, je ne peux qu'éprouver une forte empathie pour cet utopiste. Car l'une des conséquences de la Grande Guerre est de bouleverser l'ordre monarchique établi depuis des siècles dans nombre de pays européens pour ouvrir le champ des possibles à toutes les espérances. Mattéo est un stéréotype de tous les rêveurs utopistes qui croient dans la bonté et à la beauté des idéaux révolutionnaires. Comme il croit en l'amour de Juliette ou au sacrifice de Paulin. Son utopisme se fracassera sur le pragmatisme de ceux qui agissent sans état d'âme, à la guerre comme en amour. Gibrat n'axe pas son récit sur les dissensions meurtrières et destructrices des différents groupes révolutionnaires ( bien qu'évoquées au T2) ni à une analyse doctrinale mais à l'aventure humaine de son héros à la recherche de l'amour, du bien agir et de l'image de son père. Mattéo accepte ses doutes, reste responsables de ses actes dans toutes les circonstances même si les actes qu'il pose, n'ont pas les conséquences envisagées. Homme-jouet de la grande histoire des révolutions dans lesquelles le place Gibrat? Pas pour moi! Il reste maître de ses choix, même vis à vis des femmes qui l'accompagnent. Si les femmes peintes par l'auteur ont toutes un air de famille, elles sont toutes magnifiquement croquées tant physiquement que psychologiquement. Gibrat ajoute une pointe de sensualité, voire d'érotisme, qui contraste de façon heureuse avec l'ambiance tragique qui les entoure. Cela donne un côté festif propre aux illusions naissantes. Que dire des décors et du découpage. Gibrat nous invite au milieu des tranchées, dans la neige russe, la promiscuité des congés payés ou la rudesse des villages catalans. C'est du très haut niveau pictural à mon goût. Pour finir par un final grandiose où la mort est dépassée. Quel régal.
C'est vrai qu'on se dit qu'il est bien bête ce fier Mattéo de partir à la grande guerre pour épater sa Juliette qui a le coeur qui balance pour un autre homme issu d'une famille bourgeoise. Pourtant, avec un père antimilitariste et anarchiste qui a dû fuir l'Espagne, cela aurait dû le conduire à y réfléchir à deux fois. Même son ami qui revient estropié du front ne le fera pas changer d'avis. Il va vite déchanter notre Mattéo au fin fond des tranchées qui enterrent ses dernières illusions ! On nous promet une épopée époustouflante sur fond de passion romantique. Ce 1er tome réussit parfaitement à faire son effet car nous avons deux personnages qui d'un premier abord ne sont pas fait pour s'aimer mutuellement. En effet, le beau et vulnérable Mattéo vit seul avec sa mère après la mort de son père braconnier disparu en mer. Juliette est une ravissante jeune fille issue d'un milieu plus aisée qui est vêtue de belles robes jetant un érotisme troublant. L'auteur Jean-Pierre Gibrat possède une auréole particulière dans le monde de la bande dessinée depuis ses deux chefs d'oeuvre que sont Le Sursis et Le Vol du Corbeau. Ce n'est pas un auteur très prolifique. Du coup, ses productions sont très attendues par les nombreux fans. Graphiquement, c'est que du bonheur ! Une parfaite maîtrise des aquarelles ! Une colorisation qui sublime nos émotions. Il y a de la spontanéité dans son trait qui en fait oublier les petits défauts. Ce dessin est quasi-magnifique ! L'auteur parvient à conférer à ses personnages une véritable force tourmentée. Je suivrai avec délectation les aventures guerrières de ce coeur perdu. La fin de ce premier tome nous promet une suite bien mouvementée. Et cette suite se produit dans un cadre qu'on n'attendait pas à savoir celui de la Révolution Rouge qui s'abat sur la Russie tsariste alors que l'Occident est toujours en proie à une horrible guerre de tranchée. On est totalement pris par l'ambiance de cette révolution jusque dans son idéologie et ses premières contradictions. Dans le 2ème tome, Mattéo est en effet devenu un déserteur anarchiste. Il va côtoyer à nouveau l'amour et la mort. On commence à se dire que ce sympathique personnage se fourre toujours dans des conflits qui lui sont étrangers par dépit amoureux. Entre romantisme et échanges idéologiques, cette série offre bien des surprises. Personnellement, ce qui m'a intéressé était de découvrir le conflit qu'il y avait entre les néo-communistes et les anarchistes pour la prise du pouvoir. C'était quelque chose que j'ignorais jusqu'ici car on a souvent évoqué ce qui opposait les blancs aux rouges mais pas les noirs. Le travail de recherche historique apporte une dimension réaliste au récit avec également des personnages plutôt crédibles. Le trait est toujours aussi exceptionnel dans son réalisme grâce à une colorisation qui colle à merveille. Ce second tome est une réussite qui confirme le talent de l'auteur comme un des plus grands maîtres de la bande dessinée. Le 3ème tome fait un bond dans le temps. On passe à l'année 1936, celle du front populaire alors que l'Allemagne et l'Italie se prépare à la guerre. L'écriture demeure toujours aussi riche. On regrettera cependant de ne pas savoir ce qui s'est passé pendant ces 18 dernières années où notre héros a dû purger sa peine d'emprisonnement dans les bagnes de Cayenne. Il ne semble pas avoir subi le poids des années malgré sans doute de dures conditions. C'est également le temps des ballades sur la plage après avoir traversé la révolution russe et la première guerre mondiale dans les tranchées. Bref, c'est l'album d'une pause sans doute nécessaire. Dans le 4ème tome, Mattéo combat aux côtés des Républicains contre les Nationalistes lors de la guerre d'Espagne. Il a enfin un peu vieilli car on se retrouve tout de même en 1936 soit 20 ans de plus qu'au commencement du premier tome. Cependant, il est toujours aussi actif au côté d'Amélie, la belle infirmière. Rien à redire sur le dessin toujours aussi sublime de Gibrat. Les couleurs des paysages de la Catalogne (pour ne pas dire l'Espagne) sont très belles et assez marquantes. Au niveau du scénario, cela sera un tome assez lent où le récit prend son temps. D'un autre côté, il y a la qualité des dialogues ainsi qu'une certaine crédibilité de l'histoire. Au final, une belle saga romantique sur fond de tragédie historique à découvrir de toute urgence ! Note Dessin : 4.5/5 – Note Scénario : 4/5 – Note Globale : 4.25/5
C'est sûr, chaque nouvel album de Jean-Pierre Gibrat est en soi un évènement, tant ses dernières productions auront marqué leur époque, mais aussi et surtout relancé de bien belle manière le roman graphique. "Mattéo" marque donc son arrivée chez Futuropolis, l'éditeur qui tient actuellement le haut du pavé dans ce genre. Pas de surprise, ça ressemble a du Gibrat presque de bout en bout. Seul l'intermède où Mattéo est sur le front est différent, et on sent que Gibrat est moins à l'aise dans l'action, la guerre pure et dure. Il évite d'ailleurs le plus possible les scènes spectaculaires. Le second album m'a surpris, je ne m'attendais pas à ce que Mattéo voyage et aille en Russie. Ceci dit vu le personnage et ses fréquentations, c'était prévisible. L'occasion pour Gibrat de nous amener ailleurs. Dans le troisième on fait un bond dans le temps, c'est l'été 1936, le Front populaire, les congés payés... l'occasion pour l'action de se reposer un peu, sauf à la fin, et pour Mattéo un retour aux sources qui laissera des traces. Gibrat aurait pu raconter ce qu'il s'est passé dans l'intervalle, mais son récit offre tellement de possibilités qu'il ne se concentre que sur certaines périodes-clé de l'existence de son héros. Pour le reste c'est vraiment très agréable à suivre, c'est encore une histoire d'amour déçue ou contrariée, même si un peu plus complexe que d'habitude, racontée de bien belle façon, en aquarelles superbes. les quelques femmes du récit sont toujours aussi belles, malgré le passage du temps, et même si par moments Amélie et Juliette se ressemblent beaucoup. Encore une chouette série de Gibrat. Ma note réelle est de 3,5/5.
J'avais pris pied dans l'œuvre de Gibrat par Le Sursis puis le Vol du Corbeau. Quel plaisir de lecture que ce Matteo. Je vais commencer par le seul bémol à mes yeux de l'histoire : j'en aurais bien repris une louche de plus. Y a un goût de trop peu entre le T1 et le T2 même si c'est maitrisé au niveau de l'histoire. Gibrat parvient d'ailleurs à éviter de faire de Matteo un héros de guerre en le faisant déserteur puis en transportant son personnage lors de la révolution russe. Dans ce tome, une belle mise en relief des différentes factions révolutionnaires qui se combattaient autant qu'elles faisaient la guerre à la monarchie tsariste. Et Matteo navigue toujours entre deux eaux, porté par le romantisme aiguillé au cœur, que ce soit vis à vis de sa belle Juliette ou de sa pensée anarchiste révolutionnaire (opposée au pragmatisme de Léa par exemple). Le dessin est toujours aussi beau, avec le petit reproche effectivement que Léa, Juliette et Amélie sont sœurs jumelles. Dommage. Mais vraiment à lire et découvrir.
Tout d'abord, je suis un grand admirateur du dessin de Gibrat ! Quelle joie de retrouver ce trait si particulier dans Mattéo ! De plus, les thèmes et les époques abordés par Gibrat me plaisent vraiment ! J'ai adoré l'ambiance dans Le Sursis, j'ai adoré Paris dans Le Vol du Corbeau, dans Mattéo, ce sont les tranchées de la 1ere guerre mondiale, et la révolution Russe, quelle ambiance aura-t-on dans le 3e tome ? J'ai hâte ! Un seul bémol dans le dessin, c'est qu'à mon avis, ça rend pas bien si bien pour les scènes dynamiques. Je prends pour exemple dans le tome 2, la scène de fusillade, c'est pas tip top. Par contre, sur le reste c'est un véritable régal, je crois que le dessin de Gibrat est idéal pour des scènes un peu lentes, de dialogues etc. Un mot sur les couleurs, c'est toujours aussi bon, quel régal ! Sinon coté histoire, c'est très ambitieux ! Traiter plusieurs lieux et plusieurs époques à travers le même personnage, c'est une superbe idée ! L'histoire ne va ni trop vite, ni trop lentement, on s'attache bien à Mattéo, je le redis, vivement la suite !
Gibrat est le dessinateur des Femmes par excellence. Même si dans Le Sursis , on suivait l'histoire de Julien, c'est l'image de Cécile qui nous revient en tête. La même chose pour Le Vol du Corbeau où Jeanne vole la vedette à tout le monde. Pourtant là, avec "Mattéo", je sens un changement, un changement notable car même si Juliette et Amélie sont toutes deux des personnes très attirantes, elles s'effacent devant la Camarde, à savoir la guerre de 14-18, axe principal de cette bande dessinée. Plus que les personnages, ce sont les évènements qui font de ce premier album une BD exceptionnelle : du pacifiste bellant de 1914, nous passons à l'amoureux transi des tranchées de 1915, le tout dans une atmosphère pesante et oppressante, avec parfois des raccourcis saisissants de la part de Gibrat, scénariste : comme celui du départ à la guerre -page 23- ou de l'amnésie du commandant -page 50-. Le dessin de Gibrat est toujours aussi bon, aussi bien dans l'horreur de la guerre que dans les méandres de l'amour. En changeant d'éditeur, de Dupuis à Futuropolis, Gibrat n'a rien perdu de son talent, au contraire ; seules les couleurs me paraissent quelque peu plus transparentes que sur ses précédents albums. Alors que nous attendions Matteo sur les côtes espagnoles, c'est dans la Russie que nous le retrouvons dans le second album. Et j'ai littéralement été pris dans le tourbillon de l'histoire.C'est fort bien documenté et ce volume mérite amplement les deux années d'attente. Quant l'histoire rencontre la grande Histoire, cela peut donner les pires commes les plus belles choses. Ici Gibrat nous plonge avec maestria dans les prémisces de la révolution russe, où bolchevicks, menchevicks, anarchistes et russes blancs se disputent encore le pouvoir vacant. Dans cet indescriptible chaos, Mattéo,notre héros, est,une fois de plus, embourbé dans des histoires d'amours déçues, tiraillé entre son engagement anarchiste et Léa,pur produit du bolchévisme. Autant le premier volume,nous nagions dans un monde malheureusement familier et connu(celui de la première guerre mondiale, souvent traité en bande dessinée -voir le magnifique Notre Mère la Guerre de Kris et Maël) autant ce présent opus nous amène vers des territoires moins exploités dans le monde de la bd, à savoir Pétrograd en 1917; même si le retour sur Paris à la fin de l'album nous ramène plus près de chez nous - d'ailleurs la vignette en bas de la page 46 ne vous fait pas songer à un célèbre poète parisien à une table de bar ? Le dessin de Gibrat est toujours aussi réussi, aussi bien dans les scènes russes, que dans les scènes parisiennes ou champêtre. Un album dépaysant, riche en dialogues, dense, et , je le répète superbement illustré...bref une réussite, une de plus pour Gibrat. Une série en passe de devenir incontournable .
Dans ce premier opus, Gibrat nous étale encore une fois tout son talent visuel et narratif, sur un de ses thèmes préférés, la guerre, mais l'autre cette fois-ci, la première, la Grande Guerre comme on l'appelle, grande ? Quelle ironie ! Comme une insulte à la vie humaine… Gibrat nous expose un moment de la guerre des tranchées qui mérita si bien sa réputation de boucherie. Avec Mattéo, sympathique jeune homme qui par amour pour sa belle et surtout pour ne pas lui déplaire se retrouve dans cet enfer où la boue et le sang se mêlent si bien l'un à l'autre. Les dialogues sont pour la plupart introspectifs, on se retrouve dans l'intimité de Mattéo, dans ses doutes et ses angoisses. La narration dépasse aisément le niveau du Le Sursis déjà excellent, chaque bulle vaut son pesant d'or, les réflexions sur la guerre sont percutantes, parfois métaphoriques, toujours justes, elles vous touchent au cœur et vous remuent les tripes. Quelques pointes d'humour viennent alléger par moments tout cet effroyable drame. La fin de ce premier tome est assez surprenante, l'attente du deuxième tome va sembler interminable. Graphiquement ? C'est Gibrat égal à lui-même, beau, élégant, énergique, en un mot sublime…
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