La Fée Aveline

Note: 3.5/5
(3.5/5 pour 4 avis)

Le monde des contes version Goscinny.


Albums jeunesse : 10 à 13 ans Fées et féérie Goscinny

Il était une fois un pays enchanté, peuplé de fées et de chaperons rouges et où les chats étaient bottés. Un pays où les princes charmants épousaient les bergères toujours un peu surprises de voir leur ex-grenouille de mari monter sur une échelle à chaque changement de temps ! Un jour, fruit des amours d'une rose et d'un papillon, naquit une ravissante petite fée que l'on nomma Aveline. Comme de coutume, les autres fées se penchèrent sur le berceau, sauf la méchante Carabosse qu'on avait oublié d'inviter... La sorcière jeta donc sur la pauvre Aveline la malédiction qui suit : " Petite fée Aveline, chaque fois que ton coeur sera touché par l'amour tu perdras tes pouvoirs magiques ! ". Texte : L'éditeur.

Scénario
Dessin
Coq
Editeur / Collection
Genre / Public / Type
Date de parution Octobre 1999
Statut histoire Histoires courtes 1 tome paru

Couverture de la série La Fée Aveline © Vents d'Ouest 1999
Les notes
Note: 3.5/5
(3.5/5 pour 4 avis)
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05/12/2008 | Gaston
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Par Josq
Note: 5/5 Coups de coeur expiré
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Ah, La Fée Aveline, c'est toute une partie de mon adolescence... J'ai lu cet album assez tôt, et contrairement à beaucoup, je pense, j'ai pu découvrir cette oeuvre de Goscinny simultanément aux Lucky Luke et Astérix, ce qui explique probablement pourquoi je la trouve aussi culte. Mais indépendamment du souvenir d'enfance, j'adore La Fée Aveline, car je trouve qu'on est tout simplement sur une des oeuvres les plus matures de Goscinny. Adoptant une tonalité plus adulte, on n'est certes pas encore au niveau de l'oeuvre fleuve de Goscinny (mais jamais publié en albums, qu'attendent les ayants droit ?), Docteur Gaudéamus, et de ses vaudevillesques histoires (passagères) de femmes et d'adultère, mais on sent que l'auteur ne cherche pas spécialement ici à draguer un public enfantin. C'est peut-être aussi ce qui me fascinait à l'époque où je commençai à découvrir le monde des adultes et c'est ce qui rend cette Fée Aveline si particulière et assez unique au sein l'oeuvre de mon auteur favori. Attention, on est évidemment loin de la série "pour adultes", mais cette maturité de ton est en fait nécessaire pour mieux exploiter le décalage que Goscinny instaure dans ses récits, et surtout pour mieux diffuser sa vision étonnamment satirique du monde et de la société de son époque. Ce qu'il va dénoncer ou simplement croquer de manière affectueuse, ce sont tous les travers d'un monde d'adultes, d'où le fait qu'il vaut mieux avoir cette maturité nécessaire pour mieux goûter le sel des gags de l'auteur. D'où le fait aussi que pour mettre en place un décalage maximal, il faut faire entrer en collision deux mondes qui sont complètement opposés l'un à l'autre. Cette opposition, on l'a déjà vue ailleurs, mais elle trouve ici une de ses meilleures incarnations, c'est donc celle entre le monde réel et l'univers des contes de fées. Goscinny s'amuse sans cesse du décalage permanent qu'on va pouvoir trouver entre l'univers sucré et naïf des contes à la Perrault et notre monde désenchanté. Il s'en amuse, mais n'hésite pas non plus à dénoncer ce qu'il voit, et comme le dit bamiléké dans son avis, l'auteur a une vision étonnamment moderne du monde qui l'entoure, et sa vision des rapports hommes/femmes est franchement intéressante, faisant écho avec les débats que notre actualité connaît aujourd'hui. A la manière des meilleurs apologues, Goscinny met en scène une sorte de Candide moderne et donc actualisé, au travers de ce personnage de fée qui découvre un monde dont elle ignore tous les codes, et c'est d'une pertinence que n'égale que l'humour avec lequel c'est mis en scène. Le papa d'Astérix promène donc son regard acéré sur un monde pris dans une sorte de frénésie incontrôlée, un monde où tout va trop vite et où aucune place n'est laissée aux rêves. Il multiplie alors tous les outils narratifs dont il raffole : jeux de mots à foison, multiplication des "anachronismes" (pour peu qu'on puisse dater l'univers des contes de fées), choc des cultures radical, situations cocasses à hurler de rire... Jamais méchant, mais jamais consensuel, Goscinny nous offre donc un beau voyage en absurdie, et nous propose de poser un regard renouvelé sur le monde qu'on traverse au quotidien. Mais si l'ami René nous pousse à cela, ce n'est pas pour détruire, plutôt pour (re)construire quelque chose. Cette chose qu'on a perdue, et qu'il illustre à merveille ici, c'est cette capacité d'imagination, ce pouvoir de rêver, cette volonté de s'évader qui caractérise la fée Aveline. Elle vient d'un monde où tout est possible et ne comprend pas pourquoi les humains vivent tous ainsi, sans jamais chercher à s'élever au-dessus de leur médiocrité ambiante, de ce quotidien morne où personne n'est réellement heureux. Le dessin de Coq est sans aucun doute une des plus belles armes de cette bande dessinée pour illustrer le message, ou plutôt la vision du monde, qu'elle véhicule. En effet, le dessinateur espagnol a une nouvelle fois recours à ce trait d'une élégance rare, à la fois très rigoureux et très épuré, qui donne merveilleusement corps à l'imaginaire de Goscinny, que ce soit dans son ton réaliste ou dans sa fantaisie débridée. Sous la plume de Coq, notre monde et notre quotidien sont magnifiés, et leur laideur disparaît sous un éblouissant vernis de poésie. Ainsi, à l'image de son héroïne, Goscinny opère un renversement titanesque : la normalité, ce n'est plus "métro, boulot, dodo", c'est "carrosse, loisirs, château". En nous immisçant dans cet univers de contes de fée, l'auteur nous montre ce qu'il recherche partout dans notre monde : cette petite étincelle de bonheur qui change tout. Et comme dans toute son oeuvre, il la concrétise avec un art consommé. Finalement, s'il fallait résumer ce chef-d'oeuvre de Goscinny, on ne pourrait guère trouver mieux que cette magnifique phrase de Chesterton, que j'aime souvent à rappeler : "Notre monde ne manque pas de merveilles, mais seulement du désir d'être émerveillé."

28/10/2022 (modifier)