Azrayen'
1999 : Prix ACBD (tome 1). 1957. Au coeur de la guerre d'Algérie, un homme est l'objet de toutes les recherches. Pour l'armée française, il est le lieutenant Messonnier, disparu avec ses hommes depuis deux semaines. Pour Taklhit, le jeune institutrice berbère, il est Francis, l'amour de sa vie. Pour les Kabyles, il est Azrayen, L'Ange des Ténèbres.
1946 - 1960 : L'Après-Guerre et le début de la Guerre Froide Aire Libre Grands prix de la Critique ACBD La Guerre d'Algérie Le Colonialisme Maghreb
L'histoire se passe en 1957, en pleine guerre d’Algérie. Le lieutenant Messonnier, ainsi que tout son régiment, sont portés disparus depuis deux semaines. Aucune trace, aucun indice, aucun corps. Que c'est il passé? Une embuscade? Les hommes sont ils passés à l'ennemi? Une chose est sure, l’armée française, qui s'embourbe dans cette guerre sans âme, ne peut pas se permettre de perde 22 hommes avec leurs matériels. Le capitaine Valéra et son équipe sont chargés d’enquêter. Ils doivent retrouver Messonnier et sa troupe, ou au moins découvrir quelques indices, une piste. L'affaire n'est pourtant pas facile. Il ne savent pas par ou commencer, et la population locale n’est bien sur pas très coopérative. Ils ont pourtant un embryon de piste. Un des hommes du régiment disparu, Mohan Djeddar, est un ancien du FLN. Il a par la suite changé de bord et rejoint l'armée française. Il trouvait le FLN trop extrémiste à son goût. Enfin c'est ce qu'il raconte. Peut être est il un traître? Peut être s'est il fait accepter au sein du groupe de Messonnier, pour pouvoir les trahir quand ils s'y attendraient le moins? La théorie ne tient pas vraiment debout, car Mohan a fait preuve d'un comportement exemplaire au sein de l'armée française. Mais comme c'est la seule dont disposent Valéra et ses hommes, ils se rendrent dans le village d'origine de Mohan pour en savoir plus à son propos.
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Date de parution | Novembre 1998 |
Statut histoire | Série terminée 2 tomes parus |
Les avis
Il fallait bien une motivation du type "Au nom du Père" pour s'attaquer à une période aussi tabou du côté français. Frank Giroud réussit à nous livrer une histoire passionnante, équilibrée et pleine d'humanité au milieu des horreurs qui ont parsemé cette guerre. Pas facile de rendre une copie non manichéenne pour cette guerre à la fois coloniale et civile, civile car nous étions dans un département français avec "des administrées qui accouchent" et coloniale car l'état de droit y était défaillant ces mêmes administrées n'ayant pas les mêmes droits que des métropolitaines. Giroud met d'ailleurs le doigt sur la grande tromperie de cette " Opération de mantien de l'ordre" :C'est bien d'une enquête policière pour retrouver des personnes disparues dont il s'agit. Ainsi souvent l'armée française s'est vue confier un rôle de police et de justice sans en avoir ni les compétences , ni le cadre juridique, avec une obligation de résultats par le politique. Je trouve que c'est très bien exprimé en arrière-plan du scénario et que cela explique pour partie les dérives de tortures, de représailles et de bavures commises par les officiers. On le voit dans différents épisodes où le bon vouloir de l'officier fait office de décision de justice. Si ce côté, que je trouve important, est bien en filigrane Giroud n'insiste pas trop. En introduisant une belle histoire d'amour, au contraire il montre que le vivre-ensemble était possible. Utopiste peut-être mais réconfortant. Giroud respecte tous les combattants dans son ouvrage. Il nous offre des caractères bien typés de l'active pro, le conscrit parfois rebelle, le harki et le djounoud mais aucune mièvrerie ni adversaire stupide ou échappatoire scénaristique. On est très loin de la vision d'un Tanguy ou d'un Buck Danny comme soldat-chevalier blanc. Le dénouement est original et renforce l'image de précipitation dont ont souffert les actions des officiers français livrés à eux-mêmes sur le plan juridique. Je trouve le graphisme de Lax très bon. Premier ouvrage où il transforme son trait pour le rendre plus puissant et presque caricatural. Cela le mènera à l'inoubliable Choucas que j'aime beaucoup ou Mike Cervantes que j'aime un peu moins, lol. Un petit reproche , j'ai eu du mal à distinguer Valera de Messonnier ce qui crée une ambiguité avec Takhlit. Pour le reste c'est parfait, les uniformes, les GMC, les habits berbères sont admirablement reproduits. L'Algérie est un pays magnifique et Lax réussit très bien à rendre la magnificence des paysages de Kabylie. J'apprécie beaucoup aussi ses couleurs à dominantes ocre-jaune pour le présent ou rouge pour le passé. Une bien belle lecture pour un récit de guerre encore très douloureux pour notre passé historique.
Au commencement, je ne savais pas du tout à quoi m’attendre. Etant donné le scénariste, on pouvait s’attendre à une grosse documentation historique mais à part ça, on ne peut pas dire que le titre de la série nous mette sur la voie du sujet traité. En plus je suis du genre à rentrer direct dans le vif du sujet donc je me suis fait un plaisir de sauter la préface. J’ai donc été très surpris de voir que le récit se situait en Algérie pendant la guerre d’indépendance. Comme beaucoup le savent, cet horrible conflit est assez rarement abordé par ceux qui l’on fait, reconnue comme guerre depuis seulement 1999, c’est le côté obscur de notre histoire récente. Frank Giroud nous raconte ici une bête mission de recherche au beau milieu de la rigoureuse, inquiétante mais ô combien magnifique région de Kabylie. Cette mission est un prétexte pour nous laisser entrevoir les relations entre les algériens et les occupants, les différents points de vue et position politique des soldats. Et l’auteur le fait toujours sans aucun jugement, chacun est libre de se faire son idée sur tel ou tel personnages même si certains sont plus facile à haïr que d’autres. Bien sûr la violence est au rendez-vous, choquante mais attendue et inévitable quand on parle de ce sujet. Encore une fois, c’est un côté qu’il aborde avec une certaine sobriété. Le dessin et les couleurs de Lax, que je découvre ici, servent à merveille le scénario. Au début j’ai trouvé son trait trop fantaisiste par rapport à la gravité du sujet, cette impression s’estompe très rapidement et permet malgré tout de prendre une certaine distance. Quoi qu’il en soit, j’ai découvert là un grand artiste qui, même s’il n’évolue pas dans les eaux de mes lectures habituelles, m’a réellement donné envie de découvrir ses autres ouvrages. Donc jusqu’ici, j’ai trouvé ça bien fait, intéressant, émouvant aussi. Puis en guise d’épilogue, Frank Giroud nous explique la construction de ce récit sur la base des souvenirs de son père. Il ne fallait pas qu’il en dise plus pour me donner envie de la relire avec un nouveau sentiment beaucoup plus fort, celui que l’on éprouve lorsque l’on apprend le passé de quelqu’un et que l’on comprend mieux ses attitudes ou sa façon d’être en général. Merci donc à Frank et Michel Giroud pour m’avoir permis de retrouver et de comprendre un parent perdu depuis quelques temps qui, lui, a gardé ces durs souvenirs pour lui jusque dans la tombe. C’est vraiment un bel hommage à ceux qui, d’un côté comme de l’autre, ont subi ce triste passage de notre histoire.
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