Fax de Sarajevo (Fax from Sarajevo)
Will Eisner Award 1997 : Best Graphic Album: New Angoulême 1998 : Alph'Art du meilleur Album Etranger 1998 : Prix France Info de la Bande dessinée d’actualité et de reportage. Tout près de nous, les Serbes ont ravagé Sarajevo...
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C'est l'histoire réelle d'un éditeur bosniaque prisonnier avec sa famille à Sarajevo, sous la menace mortelle des Serbes, à partir d'avril 1992. Comme pour les autres habitants, leur situation devient de plus en plus intolérable. Il la décrit en adressant des fax à ses amis. Pour quitter cet enfer, il va les mobiliser ainsi que ses autres relations. Après avoir frôlé la mort maintes fois pendant un an et demi et après de nombreux échecs, ils réussissent à s'échapper...
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Date de parution | Octobre 1997 |
Statut histoire | One shot 1 tome paru |
Les avis
Soyons direct et franc : je n'ai pas du tout, mais pas du tout aimé le dessin. Il me fait penser à un dessin de BD d'action, à quelque chose de complètement inadéquat pour le propos. Et pourtant ça marche ! Car malgré ce défaut tout personnel, je dois reconnaitre que cette BD est d'une efficacité totale. Si on parle de la guerre en Yougoslavie, souvent les infos sont évasives et rares. C'est proche dans le temps et dans l'espace, mais j'ai toujours l'impression que c'est un conflit passé inaperçu par chez nous. Pourtant, cette guerre a fait des ravages que l'on constate encore aujourd'hui et qui sont malheureusement bien d'actualité ... La BD suit véritablement les personnes prises dans ce conflit et dans une ville de Sarajevo entièrement encerclée, dans laquelle la vie devient un enfer et les morts régulières. Un cauchemar qu'on ne croirait pas si récent, et pourtant ... C'est véritablement une guerre qui nous est montrée, dans toute son horreur, sans concession. Ce qui me frappe surtout, c'est qu'au fur et à mesure on est pris avec ces pauvres gens qui ne peuvent s'enfuir. Ils sont piégés d'une ville et de la passivité des autres états face à ce qui est pourtant un massacre et une guerre sanglante. C'est triste à en pleurer, mais cela est d'autant plus dur qu'on sait que cela eu lieu il y a moins de trente ans maintenant. Une BD qui est forte par son message, et qui permet de mieux se rendre compte de la violence que fut ce conflit. Il ne s'agit pas de simples rivalités d'état lors de l'éclatement de la Yougoslavie. Il y eut une authentique guerre, dans laquelle beaucoup trop de gens ont péris au nom d'idées abjectes. Et il est bon de se le rappeler, quand ces idées semblent parfois ressurgir aujourd'hui.
Voilà une histoire simple, qui dresse un réquisitoire contre les conséquences de l’éclatement de l’ex-Yougoslavie et les guerres qui l’ont accompagné. Y sont dénoncés la barbarie, le nationalisme et le racisme qui vont pousser des êtres à en massacrer d’autres, au milieu desquels ils vivaient pourtant normalement depuis bien longtemps. L’absurdité de cette guerre ne fait que rajouter à l’horreur. Et si les Serbes – qu’ils soient leader nationaliste, soldats ou miliciens, qu’ils tirent sur un enfant jouant dans la rue ou violent une femme, incarnent la bête qu’on avait cru – à tort – terrasser en 1945, d’autres responsabilités sont dénoncées. En particulier la « communauté internationale », ONU ou grandes puissances (Etats-Unis, France), dont l’hypocrisie et le cynisme atteignent ici des sommets. Je me rappelle très bien de ces événements que je suivais à l’époque. En particulier de ces casques bleus qui, après avoir désarmé des milliers de Bosniaques et leur avoir garanti leur protection, les avaient livrés aux Serbes à Srebrenica (un simple regard à la carte du pays montrait que cette enclave gênait le redécoupage des frontières préparé en haut lieu, et que donc la « purification ethnique » serbe simplifiait grandement les négociations…). Pour cet album, Kubert utilise les fax envoyés de Sarajevo par son ami Ervin Rustemagic, se contentant de « mettre en image » cette description de l’horreur. On suit donc la destruction de la ville par les canons et snipers serbes en même temps que la lutte pour la survie de la petite famille d’Ervin. C’est prenant et, hélas, Kubert n’a pas eu à ajouter grand-chose pour rendre le pathétique de la situation (pour une évocation plus poétique et science-fiction du siège de Sarajevo, voir Le Sommeil du Monstre de Bilal, en particulier le premier tome). La réussite et l’efficacité de cet album se mesure aussi en comparant avec ce qu’Hermann (qui était lui aussi un correspondant d’Ervin et en liaison avec Kubert) a fait du même sujet dans Sarajevo-Tango (album raté) ! Le seul bémol que je trouve à ajouter pour la critique de cet album concerne le visuel. Le dessin est bon, mais je n’ai pas trop accroché à la colorisation. Les couleurs, très criardes je trouve, très années 1970-80, m’ont globalement déplu. J’avais nettement préféré le superbe crayonné épuré et en Noir et Blanc de Yossel.
Cela fait des années que je cherche cet album, qui était un peu devenu mon Graal à moi : je suis friand de reportages BD, et cet opus étant épuisé en français et en anglais, il est difficilement trouvable, et son prix est souvent prohibitif sur des sites comme eBay (jusqu’à 80 euros + frais de port au moment où j’écris ces lignes !) C’est donc fébrilement que je débutai ma lecture. Je fus d’abord agréablement surpris par l’objet même : grand format, couleurs, plus de 200 pages, reproductions des faxes ayant servi de base à l’histoire, mini reportage photo en fin d’album… Du joli travail éditorial. Le début de ma lecture fut agréable, on vit vraiment ce conflit de l’intérieur, au jour le jour. Les circonstances de ce massacre et le manque de réactivité de la part de l’ONU sont toujours aussi consternants et incompressibles. Mais voila, sur le même sujet j’ai finalement préféré Gorazde de Joe Sacco, qui en plus de donner la parole aux victimes, tentait aussi d’expliquer les origines du conflit, les enjeux politique, etc… Par son concept même « Fax de Sarajevo » ne représente que la version d’un homme essayant de faire sortir sa famille de cet enfer, et à ce titre manque complètement de recul, et se résume à un long « salauds de Serbes, qu’est ce qu’ils foutent à l’ONU, comment je vais faire pour faire sortir ma famille de cet enfer ». Ca en devient un peu nombriliste, voire bureaucratique sur la fin. A ce titre il s’agit plus d’un témoignage isolé, de l’expérience d’une famille, et pas vraiment d’un reportage sur le conflit même. Voila, un témoignage intéressant quand même, à lire si vous mettez la main dessus… mais j’en attendais sans doute un peu trop.
"Plus jamais d'holocauste, plus jamais ça". Tels sont les mots de l'ONU après la découverte des camps de concentration nazis. Et comme chacun sait que des paroles n'engagent pas d'actes, l'histoire se répète, impunie pendant un temps, trop long, le temps pour les serbes d'éradiquer le plus de bosniaques. Aucun innocent, que des coupables dont le seul crime est d'être né en Bosnie. Et l'on se retrouve avec un jeu de massacre à l'échelle nationale où tous les coups sont permis, et surtout encouragés... Œuvre profondément engagée sans être épidictique, ce Fax de Sarajevo nous transporte au cœur d'un monde totalement fou. Fou de cruauté, fou d'atrocité, fou d'absurdité... les qualificatifs péjoratifs ne manquent pas pour désigner ce massacre qui a duré quatre années. Dès le début de l'histoire on constate que quelque chose cloche dans cette guerre, que le conflit ne se résume pas qu'à un affrontement entre deux armées ennemies. Des civils sont exécutés sans aucun préliminaire et sans justification aucune, à part la haine des belligérants envers ces citoyens ordinaires. Et très vite, on s'aperçoit que l'objectif ultime des serbes est d'anéantir toute la population bosniaque. Les moyens utilisés par les troupes serbes sont à la hauteur de l'ignominie du but : snipers embusqués qui tuent pour la somme dérisoire de 300$, tirs d'obus sur les convois d'aide alimentaire, bombardements incessants sur la ville, attaque sans sommation de transports ambulatoires... Dans ce monde où la survie est un combat quotidien et unique source d'espoir, nous suivons les aventures d'Ervin et de sa famille qui luttent contre des hommes inhumains. Nous assisterons en fait au combat d'Ervin pour sortir sa famille de Sarajevo. Au mépris de sa survie et par amour des siens, Ervin se verra contraint d'effectuer de nombreuses excursions, toutes ponctuées de dangers mortels car à Sarajevo, la mort rôde à chaque coin de rue. Mais pour se sortir de ce piège infernal, Ervin peut compter sur l'appui de ses amis afin de démarcher les politiques. Malheureusement pour lui, le mépris du monde et l'hypocrisie des politiques - dont la seule action forte consiste en de sempiternelles sanctions hypothétiques - envers ces hommes et femmes est tenace, et Ervin ira souvent de déceptions en déceptions. Ce qui m'a interpellé, c'est que malgré les conditions de vie chaotiques, la vie continue et la solidarité s'en trouve renforcée. Le quotidien devient une succession d'assassinats, exactions criminelles toutes plus barbares les unes que les autres, coupures de courant intempestives, recherche continuelle pour boire et manger, mais ils tiennent bon, échangeant même quelques plaisanteries furtives. L'horreur dans laquelle on est plongé assure un état de choc permanent au lecteur, d'émoi profond car Kubert raconte juste. Pas de surenchère dans l'horreur, il n'y en a pas besoin, pas d'exagération dans le malheur, seulement l'histoire vraie de cette famille qui va tout faire pour sortir de l'enfer. Malgré la qualité de la narration et des sensations fortes éprouvées, je n'ai pu m'empêcher de ressentir un peu d'ennui vers la fin du récit. C'est l'unique raison pour laquelle cet album loupe le culte.
Je ne vais pas reprendre ici l'historique et le contexte de cet album qui s'adresse aux passionnés d'histoire contemporaine et de politique internationale. Il s'agit d'un album exigeant qui se rapproche de l'album d'Hermann Sarajevo-Tango; Hermann apparaissant d'ailleurs dans cet album de Kubert. Les deux albums ont quelques similitudes puisque tous deux traitent de la manière dont les habitants d'une ville en guerre cherchent a quitter celle ci. Le héro de l'histoire Ervin Rustemagic était également l'agent d'Hermann au moment de la crise dans l'ex Yougoslavie. Mais alors qu'Hermann dénonce à la manière d'un pamphlet les gesticulations de la communauté internationale, incapable de mettre fin au conflit sur fond d'une histoire de fiction (l'enlèvement d'une jeune fille par son père et que sa mère tente de ramener en Suisse), Kubert nous conte la véritable histoire de Ervin Rustemagic et de sa famille qui tente de quitter désespérément une ville soumise aux bombardements réguliers de l'armée serbe. L'auteur nous montre le quotidien d'une famille dans une ville en guerre ou la survie est le maitre mot. Tout ce qui est décrit est la pure réalité telle que Ervin Rustemagic l'a raconté a son ami Joe Kubert au moyen de fax envoyés régulièrement lors des années 1992 et 1993. Le propos de l'auteur n'est pas véritablement de nous montrer les horreurs de la guerre mais plutôt l'ensemble des tracasseries administratives, et le cynisme auquel son héros a été confronté de la part des instances internationales. Une histoire vraie, une histoire sans concession, à lire pour mieux comprendre une guerre par ceux qui l'ont vécu au quotidien. Je regrette toutefois que le dessin n'ait pas la force et la qualité de celui de Yossel; les couleurs non plus d'ailleurs dignes d'un comics américain basique. C'est bien dommage mais cela n'enlève rien à la qualité de cet album qui mérite d'être réédité.
Cette BD demande du temps et une lecture à tête reposée. L'auteur y raconte l'histoire d'Ervin et de sa famille retranchés et assiégés à Sarajevo pendant la guerre de Yougoslavie. La particularité de ce récit vient du fait que l'histoire est basée sur des faits réels obtenus et compilés à partir de fax envoyés par Ervin à ses amis auteurs. La retranscription en BD est excellente, le dessin est vraiment bon mais malheureusement pas vraiment mis en valeur par la colorisation. Le sujet est traité de façon brute, il ne s'agit pas de l'histoire de la guerre de Yougoslavie mais celle d'Ervin et sa famille cherchant à fuir Sarajevo. Du fait l'on a pas tous les tenants et les aboutissants de ce conflit. On ressent bien la mauvaise gestion des instances internationales qui n'ont pas compris ou voulus comprendre qu'il avait un génocide ethnique. Je conseille vivement la lecture. J'aurai mis un 5/5 si le contexte avait été mieux expliqué et si les couleurs n'avaient pas été aussi vieilles et flashies. Quoiqu'il en soit, ce one shot permet de ne pas oublier ce qu'il s'est passé tout près de chez nous il y très peu de temps.
Les derniers Poilus ont à présent disparu. Dans les autres pays d’Europe, je ne suis pas sûr qu’il reste beaucoup de vétérans de la première guerre. Ceux qui ont vécu et combattu pendant la seconde sont tous des personnes âgées à présent. Il y a encore eu un conflit d’ampleur en Europe, c’est celle qui a déchiré l’ex-Yougoslavie. Il y a un peu plus de 15 ans. Une guerre où des voisins se sont déchirés, au nom de la purification ethnique. Des gens parlant la même langue, qui tuent sans vergogne, sans distinction d’âge, de sexe, de religion. Juste parce que certains sont Serbes et d’autres pas. Une guerre terrible, où certains comportements ne sont pas sans rappeler ceux qui étaient de mise cinquante ans plus tôt. Des populations terrifiées, que la communauté internationale a laissées tomber, laissant l’ogre serbe raser des villes entières, tuer des centaines de milliers de personnes… Ce calvaire, Ervin Rustemagic, éditeur de bandes dessinées bosniaque, l’a vécu de l’intérieur. Bloqué avec sa famille à Sarajevo, il envoie des centaines de fax à ses amis auteurs du monde entier : Joe Kubert aux Etats-Unis, Hermann en Belgique, Hugo Pratt en Suisse… Tous vont se démener pour permettre aux Rustemagic de sortir de la capitale bosniaque, longtemps en vain. La peur, la claustration et les courses au milieu des balles et des obus vont durer plus d’un an. C’est à partir des fax d’Ervin et de photos prises par un jeune Bosniaque disparu que Joe Kubert va composer « Fax de Sarajevo », qui va raconter l’histoire des Rustemagic. Ancien encreur de Will Eisner (dont on sent l’influence), l’auteur va livrer là son œuvre la plus personnelle, puisqu’elle touche ses amis. Il va transcender certains des poncifs du comic pour livrer un ouvrage universel. Point ici de mâchoires exagérément carrées, d’explosions à outrance ou de dialogues empreints d’humour. C’est la réalité, c’est la vie et la mort qui flirtent dans une ville de 500 000 habitants au centre de l’Europe, c’est un conflit où la barbarie refait son apparition. Bien sûr, l’auteur va prendre quelques libertés avec les dialogues, la mise en scène, changer quelques noms, mais l’essentiel est là, dans sa réalité crue. C’est un récit qui là encore prend aux tripes. Le danger quotidien des snipers et des bombardements, l’angoisse de la coupure d’électricité, le stress quand votre enfant tombe malade et que vous n’avez aucun médicament… Et puis les montagnes russes quand on veut quitter le pays, les promesses non tenues des gouvernements étrangers qui font preuve d’une lâcheté sans nom (à ce titre, Bernard Kouchner n’est pas innocent). Et pour finir, on devient blasé ; on s’habitue au sifflement continu des bombes, les cadavres dans les rues deviennent un élément de décor, la lâcheté des puissants une déception, pas un facteur de découragement. Ervin, héros ordinaire, devient une sorte de figure emblématique, un modèle de survie qui ne veut qu’une chose : sortir sa famille de cet enfer. C’est tout ce qui lui a permis de tenir le coup pendant ces longs mois, même quand il a pu sortir, seul, de Sarajevo. Ce one shot est donc une bande dessinées découpée en différents chapitres (le début des hostilités, le transfert à l’Holiday Inn, les tentatives pour sortir de la ville… Ceux-ci sont également ponctués par les fax d’Ervin et de ses amis internationaux. En fin d’album se trouve une série de photos montrent la ville avant et pendant le conflit, commentés par Kubert lui-même. L’intérêt de l’ensemble est inestimable, puisqu’il rend compte de l’intérieur et de l’extérieur d’un conflit dont la communauté internationale s’est détournée à l’époque ; seuls les commentaires de Kubert en regard des photos à la fin m’ont semblé quelque peu superfétatoires, puisqu’ils répétaient à la fois la bande dessinée et les fax d’Ervin, sans quasiment rien apporter de plus. « Culte » n’est pas le terme que j’utiliserais pour qualifier succinctement cet album. Je parlerais plutôt de « patrimoine », « d’utilité publique », ou de « devoir de mémoire ». indispensable pour comprendre ce qu’est devenue l’Europe et l’inertie de la communauté internationale.
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