Gaza 1956 - En marge de l'histoire (Footnotes in Gaza)
Angoulême 2011 : Prix Regard sur le monde 2011 : Prix France Info de la Bande dessinée d’actualité et de reportage. Quinze ans après la publication de son premier livre, Palestine une nation occupée, Joe Sacco retourne dans la bande de Gaza pour enquêter sur un massacre de la population palestinienne par l’armée israélienne en 1956.
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À l’occasion d’un reportage dans la bande de Gaza en 2001, Joe Sacco se remémore une note de bas de page lu dans un rapport des Nations Unis durant la crise de Suez en 1956. Cette note parlait d’un massacre de près de 275 villageois par l’armée israélienne. Difficile à croire, aussi le dessinateur reporter se rend une fois encore en Palestine, en 2003 cette fois-ci, pour recueillir les témoignages des survivants. Petit à petit, il remonte le fil de l’histoire pour nous délivrer un compte-rendu cruel et documenté. Comme à son habitude, Joe Sacco se met en scène, nous permettant de mieux connaître les témoins et aussi de nous monter la dureté de la vie quotidienne en Palestine depuis plus de 50 ans. Reconnu par les journalistes comme par les auteurs de bande dessinée pour son professionnalisme et sa rigueur, Joe Sacco revient avec un nouveau livre événement de plus de 400 pages sur une authentique tragédie Palestinienne oubliée de l’histoire. Texte : Editeur.
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Date de parution | 14 Janvier 2010 |
Statut histoire | One shot 1 tome paru |
Les avis
Voilà un album scandaleusement nécessaire ! Je veux dire qu’il est scandaleux qu’il soit nécessaire, et qu’il ne soit pas qu’un roman graphique ! Ceci étant dit, Joe Sacco réalise là, sur un « sale » sujet, un très bel ouvrage, fruit d’un immense travail en amont et pendant sa rédaction. J’avais déjà trouvé très bon son travail pour la publication de Palestine, mais là c’est vraiment un maître ouvrage je trouve. Qui nous replonge dans un épisode oublié (allez savoir pourquoi…), un « dommage collatéral » d’un événement lui-même à la fois méconnu et déformé, à savoir l’intervention franco-anglo-israélienne sur Suez en 1956 (beaucoup de manuels scolaires, lorsqu’ils évoquent cet événement, omettent même de citer Israël parmi les agresseurs). Et donc, Sacco a voulu vérifier les informations qu’il avait collectées selon lesquelles les Israéliens avaient profité de cette intervention pour liquider toute velléité de résistance palestinienne en massacrant des centaines de civils dans la bande de Gaza, à Rafah et Khan Younis. On retrouve dans cet album les qualités habituelles de son travail. D’abord un très bon dessin, simple, clair, qui n’hésite pas à présenter des décors fouillés et précis. Ensuite une construction vivante, mêlant quelques temps faibles, des moments de « détente », à des passages plus glauques et douloureux (qui dominent vu le sujet). Enfin, Sacco se pose des questions, nous fait part de ses interrogations, de ses méthodes de travail, et, même s’il aboutit à un album à charge, il n’hésite pas à montrer que les Palestiniens ne sont pas unanimes face au Hamas ou au Fatah. De la même manière, il fournit ses sources en fin d’album et donne la parole à des responsables israéliens. Pas de manichéisme outrancier donc. Pas équilibré pourtant ? Mais il existe un tel déséquilibre dans les temps de paroles accordés à chaque camp dans cet enfer qu’est devenu ce petit bout de Terre (enfer pour les réfugiés palestiniens surtout on l’a bien compris !) qu’il n’y a là que volonté de rétablir un semblant d’équité. Et les récents événements de l’année 2014 ne font que renforcer le sentiment d’impuissance, de dégoût ressenti par tout observateur neutre, et par les Palestiniens que Sacco a rencontrés pour son ouvrage. N’oublions pas qui est l’agresseur, qui occupe illégalement les terres des autres, qui détruit leurs maisons, tue leurs enfants, arrache leurs cultures, détruit les infrastructures sanitaires et scolaires, assassine arbitrairement et hors décision judiciaire (avec des missiles, et tant pis pour ceux qui se trouvent autour), c’est-à-dire qui commet quotidiennement des crimes de guerre, en toute impunité. Que les médias taisent cette évidence est scandaleux. Qu’ils continuent parfois à mettre sur le même plan le stress occasionné par les tirs de missiles du Hamas et les bombardements israéliens est choquant. Bien sûr des civils israéliens meurent, des Palestiniens commettent des crimes. C’est inacceptable. Mais rien n’est fait pour changer les choses. Et sans le travail de personnes comme Joe Sacco, les Palestiniens sont condamnés à mourir à petit feu, la bouche fermée, aucun BHL ne venant sur les plateaux télé réclamer une intervention « de la communauté internationale ». Sacco est un auteur engagé, dans le noble sens du terme. Il est sûrement critiquable, mais il argumente, et amène au débat. Pour y participer, je vous recommande chaudement lecture et achat de ce remarquable documentaire !
Ça c'est une vraie claque ! Il y a déjà quelques mois que je feuilletais ce gros livre et que je le reposais, remettant sa lecture à plus tard malgré les critiques élogieuses dont il bénéficie. Le dessin un peu raide, entre réalisme et caricature ne me plaît toujours pas, et puis tout de même : presque 400 pages… Mais quand je m'y suis plongé, pas moyen de lâcher ce long récit. Et je souscris aux nombreux avis de lecteurs enthousiastes : Joe Sacco est un grand Monsieur. Il nous offre un récit d’une rare clarté sur l’histoire de la bande de Gaza entre la fin des années 1940 et le début des années 2000. L'histoire est généralement écrite par les vainqueurs et celle de Gaza n’échappe pas à la règle. Or, les Palestiniens sont du côté des perdants. C’est peut-être pour cela qu’ils se construisent une histoire souvent déformée par l’amertume, la haine et le désir de revanche. Sacco s’attache à démêler les faits contradictoires qui lui sont présentés pour s’intéresser à des événements presque oubliés, y compris par les Palestiniens eux-mêmes. À l’automne 1956, durant la crise de Suez, en marge de l’histoire, l’armée israélienne envahit la bande de Gaza et tue quelques centaines de civils Palestiniens. Loin de la presse et de la grande histoire qui s’écrit en Égypte, ces morts passent quasiment inaperçus et sont vite oubliés au fil des nombreux conflits ultérieurs. Cinquante ans plus tard, dans un climat de guerre civile, Sacco part à la rencontre des témoins survivants pour reconstituer les faits. L’auteur ne s’en cache pas : il se bat contre lui-même pour ne pas prendre parti et rester objectif. Même s’il privilégie le point de vue palestinien, il s’efforce toujours de vérifier ses sources, de croiser les témoignages et de les confronter à ceux des Israéliens quand c’est possible. Son honnêteté est touchante et admirable. C’est autant dans la description de sa démarche d’enquêteur que dans la reconstitution des événements de 1956 que Sacco se montre génial. Jamais je n’ai autant compris toute la difficulté qu'il y a à reconstituer un événement passé avec la rigueur du journaliste et de l’historien. La quête des témoins dans des villes en ruines, les témoignages contradictoires de vieillards capricieux, amnésiques ou affabulateurs, les quasi-vérités ou les faux mensonges sont autant d’obstacles qu’il doit affronter au cours de sa longue enquête. Au final, on sent tout ce que la transcription en bande dessinée des massacres de l’année 1956 lui a coûté de travail et d’efforts. Sacco n’est ni vraiment journaliste, ni vraiment historien, mais il parvient finalement à rendre compte des faits avec plus de force et d’efficacité que ne l’auraient fait ces deux professions. Reportage, livre d’histoire, discours militant, réflexion sur le métier de journaliste, essai sur le rapport entre histoire et mémoire… Gaza 1956, en marge de l’histoire est tout cela à la fois et bien plus encore. Sa portée didactique dépasse largement le sujet traité. Une bande dessinée atypique dont la lecture me semble indispensable.
Tout conflit armé quelqu'il soit est à proscrire. Il faudrait toujours trouver des solutions pacifistes pour le bien commun des peuples. Au-delà de ce constat bienveillant et presque utopiste, je dois bien admettre que les médias nous ont toujours donné que le seul point de vue des israéliens dont le peuple avait subi les pires exactions pendant la Seconde Guerre Mondiale. Il y a toujours eu une espèce de sympathie liée à la compassion ce qui nous faisait fermer les yeux. Pour autant, ce conflit est l'un des plus compliqué et des plus insolubles qui puissent exister puisque la même terre est revendiquée par deux peuples que tout oppose. L'Occident avait clairement choisi son camp et ce, depuis le début. C'est vrai que depuis la seconde Intifada, je m'étais posé de légitimes questions en voyant les destructions de maisons mené par un gouvernement belliqueux et irresponsable. Et s'ils avaient tort ? Bref, le doute s'est installé. On appelait toujours dans les médias les palestiniens de vulgaires terroristes qui se faisaient sauter par désespoir de cause dans les rues de Tel-Aviv. En lisant cette oeuvre, nous avons un autre point de vue qui m'a d'ailleurs convaincu personnellement. On n'a pas assez parler des exactions israéliennes comme celle de novembre 1956. Il est vrai que l'auteur fait un parallèle intéressant entre le passé et le présent sur la situation qui n'a finalement guère évolué dans la bande de Gaza. Comme beaucoup d'entre nous, j'ignorais ce qui s'était passé. Ces exécutions sommaires de centaines de civils est consternante. Il n'y a aucune justification pour ces meurtres commis de sang froid devant des familles apeurées. C'est vrai qu'Israel, sous prétexte de défendre sa souveraineté nationale, applique la loi du talion. C'est franchement indigne d'une démocratie responsable. En tout cas, je ne partage pas ces valeurs. J'espère qu'un beau jour, il y aura un gouvernant assez visionnaire pour démanteler les colonies et laisser vivre tranquillement un peuple totalement opprimé. J'espère que viendra également le temps de la vérité et du pardon et qu'on pourra tourner la page de ce conflit qui n'a que trop duré. On a reproché à l'auteur son manque de partialité. Cela me fait bien rire quand je vois que les médias ont clairement été d'un côté pendant des années et qu'ils se contentent désormais d'une simple neutralité. C'était extrêmement courageux de la part de Joe Sacco. Par ailleurs, il a mené un travail d'enquête journalistique basé sur une multitude de témoignages qu'il a trié sans compter les archives historiques sur lesquels il s'appuie. C'est l'une des oeuvres les plus marquantes et les plus instructives dans la démarche que j'ai pu lire. Ce n'est pas une réécriture de l'Histoire mais il rétablit de simples vérités au-delà de tout manichéisme.
Joe Sacco est un auteur de bande dessinée atypique qui, grâce à son métier de journaliste, se penche sur les grands drames de l’histoire récente et les retraduit sous forme picturale. Joe Sacco s’est ainsi penché sur la guerre de Yougoslavie dans Gorazde ou sur le conflit isréalo-palestinien déjà traité dans Palestine lors de la Première Intifada de 1991. En 2003, Joe Sacco est donc reparti en Palestine enquêter dans la bande de Gaza sur un massacre perpétré par les Israéliens lors de l’offensive menée par les troupes anglo-franco-israéliennes contre le Raïs Nasser en 1956 lors de la nationalisation du canal de Suez par l’Egypte. Un massacre a été mené par les Israéliens dans la ville de Khan Younis à Gaza. Sacco jongle entre les périodes : fixant l’essentiel de son récit en 2003, où il montre les Palestiniens mener une seconde Intifada contre Israël. L’épisode des maisons suspectes et de leur destruction est un formidable objet de documentaire. Mais l’auteur part surtout à la recherche de témoins du massacre de 1956. Sacco est alors confronté aux efforts de mémoire des Gazaouis et à la difficulté de saisir la vérité dans les témoignages. Le temps a passé et les confusions sont nombreuses notamment entre les deux guerres de 1967 et 1956. De plus, suivant les témoins, certains détails se contredisent. Peu à peu, cependant une vérité effroyable se fait jour… Le tout est assez convaincant, malgré le dessin un peu austère de Sacco. Mais on se perd parfois entre tous les personnages témoins et la surabondance de textes et de descriptions qui alourdissent parfois le propos.
Cette BD est à mes yeux un formidable documentaire qui m'a appris une quantité énorme de choses tout en me frappant par la force de certains de ses passages. Depuis le temps que Joe Sacco use du médium qu'est la bande dessinée pour mettre en texte et en images ses reportages en ex-Yougoslavie ou au Moyen Orient, on peut dire qu'il a appris à développer son art et sa méthode. Ce qu'il raconte sur le conflit Israelo-Palestinien dans cet album est triplement instructif. En effet, son objectif premier est d'investiguer et de nous décrire ce qu'il s'est passé dans la bande de Gaza en 1956, lors de la Crise de Suez. Je n'en avais aucune idée, et c'est particulièrement édifiant, voire terrifiant. En même temps, il nous raconte son enquête sur les lieux en 2003 à la recherche de témoignages de survivants et il nous décrit de l'intérieur la situation plus actuelle à Gaza, à une époque où les bulldozers israéliens démolissaient l'une après l'autre les maisons palestiniennes en bordure des frontières imposées et où les USA menaçaient d'attaquer à tout moment l'Irak de Saddam Hussein. Et, troisième récit dans le récit, l'auteur nous fait part de son travail d'investigation et surtout du tri, des recoupements et de l'analyse qu'il est obligé de réaliser pour faire ressortir ce qui s'approche le plus de la vérité sur les évènements qui ont eu lieu cinquante ans auparavant quand de nombreuses versions contradictoires s'opposent entre les souvenirs confus, les traumatismes et la propagande. J'ai été particulièrement captivé par le récit des évènements de 1956. Joe Sacco fait le choix judicieux de décrire auparavant la situation d'ensemble, partant d'une anecdote concernant le congrès sioniste de Bâle en 1897 puis la création d'Israël, l'expropriation, la fuite et le parquage des palestiniens dans des camps de réfugiés tout d'abord totalement démunis, puis les incursions des réfugiés en territoire nouvellement israélien, l'escalade de la violence, des représailles, et tout ce qui a amené à une haine totale et mutuelle et à la situation complètement bloquée de la région. Mais je ne savais pas à quel point les choses avaient atteint un pic dans l'horreur en 1956. C'est terrifiant ! Aberrant ! Surtout quand on s'imagine que ces évènements ont eu lieu à peine une dizaine d'années après la seconde guerre mondiale et ce que les Juifs avaient subi de leur côté. L'horreur des évènements parait telle que j'en venais à douter, à me demander s'il y avait une part de dramatisation accentuée par les années, de mythe additionné aux faits historiques. Mais Joe Sacco présente l'ensemble avec la plus grande impartialité possible. En même temps qu'il fouille les souvenirs et les témoignages des anciens palestiniens, il écarte ce qui ne lui semble pas formellement prouvé, donne la parole à un ancien officier israélien, présente la version officielle du gouvernement israélien ainsi que celle adoptée par les rapports de l'ONU. La somme et la corrélation des témoignages (ainsi que la confiance que j'ai dans l'honnêteté du travail de l'auteur) ne laissent au final guère de doutes. Et le pire, c'est que ces évènements ont été suffisamment occultés dans l'histoire officielle pour que je ne les découvre qu'à la lecture de cet album. Cet album se révèle donc un document informatif ultra-complet, intensément intéressant et instructif. Sur la forme, maintenant, c'est également du très bon boulot. Joe Sacco a fait de grands progrès en matière de dessin depuis ses premières oeuvres où je trouvais son trait un peu ingrat. Ici, les décors sont particulièrement réussis, les angles de vue très bien choisis et les personnages sont tout à fait corrects. La seule chose qui m'empêche de donner la note maximale à cet ouvrage, c'est le côté assez indigeste de la narration. La somme d'informations à assimiler est énorme, les témoignages différents amènent de nombreuses répétitions à chaque fois légèrement différentes les unes des autres, et tout cela amène le lecteur à devoir s'accrocher pour ne pas s'y perdre. Malgré la force du récit, il se révèle donc un petit peu assommant sur la longueur. Et prendre des pauses en cours de lecture n'est pas très conseillé pour autant car, vu la complexité du récit, il est possible d'être largué le temps de reprendre le récit. C'est là tout le reproche que je ferais à cette bande dessinée qui, outre cela, est extrêmement instructive, dense et bien foutue. J'ajouterais en outre que les dernières planches, muettes, sont particulièrement fortes en émotion, conclusion idéale en impact et en évocation de ce qu'ont vécu les réfugiés de Rafah à l'époque.
Un très bon ouvrage sur un massacre malheureusement pratiquement oublié. Encore une fois, je suis ébloui par la documentation de Sacco. On voit qu'il est réellement passionné par son sujet. Je ne suis pas très fan de son dessin (je n'aime pas ses visages), mais sa narration est très fluide. Je n'étais pas capable de lâcher le livre même si c'était toujours les mêmes scènes qui reviennent sans arrêt. J’ai aimé aussi voir comment l’auteur met en parallèle les différents témoignages et essaie de démêler les vrais et les faux souvenirs. Toutefois, ce que j'ai surtout apprécié dans ce livre, c'est que l'auteur ne prend jamais de ton moralisateur chiant du genre 'Les israéliens sont des monstres qui font du mal aux pauvres innocents palestiniens'. Il ne fait que montrer la vie quotidienne de gens qui souffrent. Un livre à lire absolument même si le conflit Israël-Palestine ne vous intéresse pas. Il faut que ces évènements ne soient pas oubliés.
La lecture de « Gaza 1956, en marge de l’histoire » m’a conforté dans l’idée que les colonies israéliennes implantées dans la bande de Gaza sont à l’origine des relations tendues entre les palestiniens et l’Etat d’Israël. En effet, comment peut-on tolérer que les israéliens puissent diviser la bande de Gaza en deux (Nord et Sud) lorsque des convois viennent alimenter leurs colonies. Pour précision, il faut savoir que les autorités israéliennes envoient l’armée se poster de part et d’autre des routes (elles sont murées aussi de part et d'autres comme des corridors !) qui relient ces colonies à l’état hébreu pour « protéger » leurs ressortissants contre les palestiniens ; ainsi, les « arabes » n’ont pas d’autre choix que d’attendre que ces opérations militaires soient terminées pour pouvoir circuler ! Aberrant non ?! Comment peut-on tolérer aussi ce qui s’est passé en novembre 1956 à Rafah où selon les témoignages des palestiniens, les soldats israéliens auraient massacrés des centaines d’hommes qu’ils soient civils ou non ? Et pourtant, des doutes persistent sur les faits… puisque Joe Sacco aura l’honnêteté de citer des témoignages contradictoires de palestiniens ayant apparemment vécus ce drame. D’ailleurs, les articles réunis en fin d’ouvrage ne font que nous jeter le trouble sur la véracité des événements du 12 novembre 1956. Alors oui, il s’est passé quelque chose d’horrible ce jour-là qui montera à jamais les palestiniens contre les israéliens mais comment ça s’est passé réellement ? Qui dit vraiment la vérité ? Combien y a-t-il eu de victimes ? Qui sont les vrais responsables de ce drame ? Ça, on ne le saura vraisemblablement jamais malgré les nombreuses recherches, témoignages sur place et l’acharnement de Joe Sacco pour connaître l’authenticité des faits. « Gaza 1956, en marge de l’histoire » est une mine d’or pour tous les lecteurs fans d’histoire désirant connaître comment et pourquoi la bande de Gaza est apparue. Ils découvriront aussi le quotidien des palestiniens qui tentent de survivre dans une région où les israéliens ont la main libre sur l’économie et la gestion des territoires grâce à leur suprématie militaire (et aussi à l’indifférence de la communauté internationale mais ceci est une autre histoire…). Après, est-ce que l’état hébreu est totalement responsable de cette situation en Palestine ? Je pense négativement, je suis en fait convaincu que les « arabes » sont aussi coupables de cet état de fait… franchement, j’ai du mal à comprendre comment un peuple ayant subi les pires exactions pendant la seconde guerre mondiale aient pu à leur tour commettre des atrocités aux palestiniens. J’ai du mal aussi à concevoir que ces pays n’aient jamais su mettre leurs différends de côté et pu créer une entente cordiale à l’image du couple franco-allemand. Tant que ces deux peuples ne feront pas table rase sur les crimes du passé (il est vrai que c’est plus facile à dire qu’à le faire !), ils ne se concilieront jamais ! Que faut-il penser de la bd proprement dite ? Alors oui, l’auteur use beaucoup de la voix-off pour raconter les différents témoignages qu’il a pus récolter. Alors oui, certaines images semblent inutiles étant donné qu’elles ne font qu’illustrer le commentaire de Joe Sacco mais… « Gaza 1956, en marge de l’histoire » reste une bd ! En fait, le gros reproche que je fais à cet album, c’est sa grande redondance des témoignages. Sans ces répétitions, je pense que la bd aurait moins éprouvante, plus « agréable » à lire (400 pages tout de même !) tout en gardant l’intensité et l’émotion des scènes où les palestiniens s’expriment. Que dire du graphisme de Joe Sacco ? Comme lorsque je l’avais signalé pendant la lecture de « Gorazde » : il faut un temps d’adaptation pour l’apprécier pleinement ! L’auteur a eu l’honnêteté de préciser qu’il utilise ses photographies pour dessiner ses bds : le résultat donne des décors réalistes mais pas trop car Joe Sacco force les expressions (sans tomber dans de la caricature pure et dure !) de ses personnages pour mieux nous faire partager leurs émotions. En fait, je suis particulièrement ébahi de voir à tel point cet auteur arrive à différencier aussi nettement des trentaines de personnages dans une seule case ! Du grand art ! A défaut de nous apporter des réponses au conflit israélo-palestinien (ce n’est d’ailleurs pas le but de ce livre !), « Gaza 1956, en marge de l’histoire » m’est apparue comme une bd vraiment très intéressante à lire pour comprendre comment la bande de Gaza s’est créée et pour connaître la situation actuelle dans cette région… du moins pour les bédéphiles qui aiment les genres documentaire et historique. Pour ces derniers, « Gaza 1956, en marge de l’histoire » est un ouvrage à découvrir absolument et à lire en y prenant son temps !
Cet avis sur « Gaza 1956, en marge de l’histoire » est mon 300ème avis sur notre beau site marron. Jamais je n’aurais cru attraper à ce point le virus de la bande dessinée lors de mon arrivée en avril 2004, soit il y a plus de 6 ans… Pour fêter ce 300ème avis, il me fallait une bande dessinée hors norme, une bande dessinée qui sorte du lot. A la lecture de « Gaza 1956, en marge de l’histoire », cela m’est apparu comme une évidence : « j’en ferai mon 300ème avis » me suis-je dis spontanément. « Gaza 1956, en marge de l’histoire » est une expérience du 9ème art qui vaut la peine d’être vécue. Documentaire exhaustif et bien présenté, ce one shot est un bel objet en soi. La couverture cartonnée et épaisse ainsi qu’un papier de qualité rendent la prise en main agréable et me confortent dans l’idée qu’une vraie bande dessinée ne pourra jamais perdre de son charme face à la bande dessinée numérique. Joe Sacco a abattu un travail de titan afin de permettre aux humbles lecteurs que nous sommes de nous instruire sur les événements qui se sont déroulés à Gaza en 1956. Des années de travail, des centaines d’heures d’interview et d’enquêtes au cœur de la bande de Gaza, une prise de risque, Joe Sacco est un vrai journaliste d’investigation. Le rendu final de son travail est bon. La restitution des témoignages est faite avec intelligence et dynamisme. Joe Sacco ne se contente pas de ce qu’on lui raconte. Il critique les versions des faits qui lui sont soumises, les met en contradiction avec d’autres témoignages ou sources d’information. Il l’explique d’ailleurs à plusieurs reprises au lecteur en pointant les incohérences de certains témoignages. Quoi de plus difficile que de faire ressortir la vérité sur des événements qui se sont déroulés il y a plus de 50 ans, surtout quand les informations proviennent des témoignages de personnes plutôt âgées qui vivent la guerre et des événements similaires au quotidien ? Joe Sacco a l’honnêteté de reconnaître l’invalidité de certaines de ses sources mais arrive quand même à cerner la vérité par le recoupement des divers récits qui lui sont rapportés. Graphiquement, il n’y a rien à dire. Le noir et blanc est parfaitement adapté au style documentaire. Le dessin est à la fois très expressif et descriptif avec toutefois un léger effet de caricature des visages qui m’a parfois gêné… Je pense notamment aux diverses scènes où les femmes palestiniennes se roulent par terre de douleur à l’annonce de la perte d’un proche. Je ne peux cependant franchir le pas du 3,25/5. En effet, la grande exhaustivité et la lenteur épisodique de la narration brisent le rythme de lecture, ce qui est très regrettable à mes yeux. La suppression de certains passages, au pire leur réduction, aurait été la bienvenue. La lecture de ce pavé est véritablement éprouvante. Mais que ma note ne refroidisse pas les amateurs de journalisme. « Gaza 1956, en marge de l’histoire » est un bel album intelligent à posséder pour ceux qui souhaitent donner une profondeur à leur bibliothèque. A sa lecture, vous vous poserez peut-être la même question que moi : Comment le peuple juif qui a tant souffert au fil des siècles, qui connaît si bien le sentiment d’être discriminé, qui a été pourchassé pendant toute la Seconde Guerre Mondiale, peut-il infliger les mêmes atrocités que celles qu’il a subi au peuple palestinien ? Moi ça me laisse sans voix…
Voilà, c'est lu... Cette BD pavé aurait pour peu, le double intérêt de nous éclairer sur cette zone explosive du globe et de servir de projectile pour l'Intifada... J'exagère, mais à peine. Car si le sujet exposé par Joe Sacco a le mérite d'apporter un peu de lumière sur un événement trouble de novembre 1956, j'ai trouvé sa présentation longue, limite ennuyeuse par moments. Heureusement, ce n'est pas le sentiment général qu'il me reste de cette lecture. Et par delà sa volonté d'objectivité, certains récits m'ont laissé pantois, tant le vécu et le quotidien de cette population est révoltant. Reste au final que la retranscription journalistique de son enquête montre ses limites (il le reconnait lui-même) ; déterrer un événement douloureux vieux de 50 ans reste très difficile et peu compréhensible pour une population qui (sur)vis au jour le jour... Pour ce qui est de son dessin, contrairement à certains, j'ai trouvé très intéressant d'aborder un tel sujet par le support BD. Moi qui partais un brin sceptique et qui ne suis pas vraiment fan du concept BD documentaire, j'avoue avoir été convaincu. D'autant plus que le dessin réaliste en noir & blanc est pleinement maîtrisé. Sa construction de l'espace par les hachures est assez bluffante ! Au final, une BD instructive, mais un peu longuette à cause, me semble-t-il, d'une volonté d'enquête voulue exhaustive. A lire en l'empruntant dans la bibliothèque la plus proche de chez vous...
C'est tout d'abord un vrai travail journalistique narratif qui s'attache à faire la lumière sur un événement court (1 journée) du conflit Israélo Palestinien qui dure depuis plus de cinquante ans. L'auteur nous plonge non seulement dans cette histoire mais aussi dans la vie actuelle des gazaouis. Le recoupement de ces nombreux témoignages et recherches dans les archives de l'ONU nous permettent de penser que le récit retrace de façon objective cette journée. Ensuite, les dessins très réalistes nous emmènent complètement dans son enquête. On a l'impression par moment de revivre cet événement, de courir avec lui dans le camp pour échapper aux tirs israéliens, de partager ses doutes sur certains récits, de rire aussi... L'avantage de la BD par rapport à un reportage classique c'est qu'elle peut recréer une situation à partir de photos, de fait, de narrations et les faire revivre. C'est une BD reportage poignante.
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